Comment être un hétérosexuel pur jus qui aime une jolie Amandine quand sa famille (enfin sa mère) a toujours voulu que l’on soit une fille, enfin quand on imagine que sa famille (enfin sa mère) a toujours voulu que l’on soit une fille, donc passablement efféminé, donc aimant Sisi, donc nul en sport, donc forcément de la jaquette (alors qu’en fait, non) ? Transposant, en images qui bougent pour de vrai, son spectacle autobiographique de 2008, Guillaume Gallienne revisite les affres de sa jeunesse sexuellement tourmentée dans une comédie sincère, certes drôle, mais bien loin des grands éclats de rire promis par toute une presse en étrange pâmoison et (sur)vendus depuis Cannes avec gros buzz à la clé pour faire mousser la mousse. Clairement on ne se tord pas ; on fait risette. Nuance.
Mylène Gautier l’a pourtant ahané à l’époque : "Puisqu’il faut choisir, à mots doux je peux le dire, sans contrefaçon, je suis un garçon". C’est quoi qu’il a pas compris là-dedans, Gallienne ? En fait, le malentendu viendrait plutôt de sa mère, et quelle mère ! Gallienne excelle et s’amuse dans le rôle de cette über mater (on pourrait quasi dire, en étant grandement malintentionné, que le film ne vaut que pour elle, que pour ça), mère grande gueule, mère exigeante, mère piquante, féroce et terriblement humaine à la fois. Une espèce de Cruella / Anna Wintour / Marquise de Merteuil qui aime trop son mouflet pour lui balancer la vérité (non mon fils, tu n’es pas une pédale) et pouvoir le garder rien que pour elle dans ses stricts jupons (pas de rivales à l’horizon, c’est bien pratique).
Le reste importe peu finalement, ne serait que méprisables broutilles : mise en scène brouillonne, quelques clichés, quelques effets et quelques coups réussis pour faire croire que ce n’est pas que du théâtre filmé, un final un peu trop tire-larmes sur fond de petites notes de piano, un humour léger, un peu facile parfois, un peu caricatural même (les scènes à l’armée), voire très lourd (celles à la cure thermale). Le film de Gallienne verse davantage dans la gaudriole style Pédale douce que dans l’ironie sensass à La confusion des genres. C’est un coming out qui nous l’a fait à l’envers et où la question identitaire, entre narcissisme, double jeu et filiation artistique, se pose là sans mordant ni pertinence pour faire poiler bobos et beaufs dans un même élan populaire.