Vous aimez les chairs flasques et les cheveux blancs ? Vous appréciez les peaux flétries et les fesses raplapla ? Vous êtes peu regardant sur le jeu des acteurs, la qualité des dialogues et le rythme intrinsèque d’un film ? Alors Gerontophilia est fait pour vous. Bruce LaBruce, qu’on avait connu plus radical et plus trash (No skin off my ass, The Raspberry reich, L.A. zombie avec François Sagat ou le bien nommé Hustler white), s’essaie désormais à la "comédie romantique subversive". Sauf que ça ne ressemble pas à grand-chose, au mieux à un Gregg Araki des mauvais jours (Smiley face, Kaboom), au pire à un premier film d’étudiant en cinéma tombé raide dingue de son acteur (Pier-Gabriel Lajoie, mignon tout plein, mais fade).
On imagine justement Araki (ou même Xavier Dolan) s’emparer d’un tel sujet (la relation amoureuse entre un jeune garçon de 20 ans, attiré par les vieux messieurs, et un pimpant octogénaire) et le transformer en or. En faire une fête de couleurs, d’émotions et des sens. Une pépite folle. À la place, un truc mou et mal fichu qui ne dégage absolument rien, pas même un commencement d’empathie pour M. Peabody (Walter Borden, quelconque) et Lake, gueule d’ange évanescente (Désirée, sa copine/meilleure amie, dit d’ailleurs de lui qu’il est un saint). Il n’est pas question de remettre en cause cette volonté de LaBruce à vouloir changer de registre, bien au contraire (réaliser un film simple et tendre, éloigné de son univers habituel fait de contre-culture et de pornographie exacerbées). C’est juste que son film est raté.
LaBruce n’est pas un bon directeur d’acteurs (Marie-Hélène Thibault, dans le rôle de la mère, est très mauvaise). Ce n’est pas un bon metteur en scène non plus, ni un bon scénariste. Et Gerontophilia n’est pas un bon film. Vaguement sympathique, de loin, de très loin, mais pas bon. La thématique casse-gueule (évoquer une sexualité "hors normes" parce que rejetée, ignorée par nos sociétés moralement rabougries) était pourtant osée, excitante même, mais LaBruce gâche tout en livrant une bluette quasi standard, sans inventivité, sans fougue, sans émois, et plusieurs scènes réussies (la toilette filmée comme une scène érotique, la scène à la piscine, l’anniversaire de M. Peabody qui tourne aux combats de jeunes coqs…) ne parviennent jamais à tirer le film vers le haut, comme collé à son alaise.