Les Xhosa sont une ethnie d’Afrique du Sud dont Nelson Mandela fut l’une des figures les plus illustres. Elle pratique encore l’ukwaluka, un rite initiatique et ancestral (aujourd’hui de plus en plus critiqué) où de jeunes garçons sont circoncis (à l’arrachée, avec une lame de rasoir), mis à l’écart et endurcis dans l’objectif de faire d’eux des hommes à leur retour dans leur famille. Une sorte d’entrée dans l’âge adulte, d’émancipation sociale, une confirmation de sa masculinité dans une société valorisant machisme et virilité, et rejetant, par extension, toute velléité d’homosexualité (plutôt bien instituée en Afrique du Sud, mais rejetée malgré tout par une grande majorité de la population avec de nombreux cas de discriminations, et même d’assassinats).
John Trengove mêle ainsi tradition patriarcale et intime contrarié (comme dans Le secret de Brokeback Mountain, deux hommes se retrouvent chaque année, en tant qu’instructeurs lors de l’ukwaluka, pour vivre leur amour interdit), faisant de son film un beau récit sur l’identité (la sienne, et celle parmi les autres) et sur l’intégration (quelle place prétendre dans un monde qui atteste de son rejet et de son indifférence face à ce que l’on peut être ?). Sa caméra capte, frôle, frémit, comme cherchant sa place, cherchant la présence physique, l’essence de ces garçons et de ces hommes dans leur communion à la Terre, au primitif (danses autour du feu, chants tribaux, peintures corporelles…), jusqu’à en révéler les failles et les blessures (The wound, titre original du film).
Aux deux points d’ancrage de son scénario, Trengove rajoute un troisième élément avec le personnage de Kwanda, un initié sous la responsabilité de Xolani, qui remettra en cause les fondements du rituel et découvrira la nature des sentiments entre Xolani et Vija. Une sorte de triangle amoureux se met alors en place, inattendu, mais qui peine à convaincre et qui n’était pas fondamentalement nécessaire par rapport à la force et à la portée des sujets abordés, que ce soit dans la représentation et la description de l’ukwaluka ou dans la relation tourmentée (parce qu’en marge de ce qui est supposé être la règle et la moralité) de Xolani et Vija. Et qui, surtout, offre un final décevant, presque grotesque, quand la vision, plus signifiante, des deux amants enlacés dans la nature suffisait à clore le film avec douceur, ouvert soudain sur l’inconnu.