En 2012 puis en 2014, le dessinateur Mathieu Sapin a suivi la campagne présidentielle de François Hollande puis son mandat à l’Élysée pendant un an. Il en a tiré deux albums (Campagne présidentielle et Le château) où il croque les grands et petits moments du Rouennais et de son entourage. Il était donc l’homme de la situation pour mettre en scène l’histoire de ce jeune assistant embarqué, presque malgré lui, dans les vicissitudes (et turpitudes) du pouvoir. L’intrigue pourra éventuellement rappeler celle de Quai d’Orsay, autre bande dessinée explorant elle aussi le monde clos et abrutissant de la politique, et adaptée au cinéma avec succès par Bertrand Tavernier en 2013.
Sapin et son scénariste Noé Debré, apparemment plus inspirés par la verve fielleuse de la série Veep que l’intransigeance sorkinienne d’À la Maison Blanche, prennent le parti de l’humour et de la caricature. Encore qu’à bien y réfléchir, le milieu politique est en soi un milieu complètement caricatural et jamais loin d’un précieux ridicule qui, fort (mal)heureusement, n’a toujours tué personne. Il suffit par exemple d’écouter député(e)s et ministres le matin à la radio, parader en meeting ou dans les campagnes pour s’en rendre compte (formules creuses, discours interchangeables, postures vaines, hypocrisies et retournements de veste à gogo…).
Ne manque donc ici aucune figure imposée, du candidat comme dépassé par les évènements aux conseillers arrogants en passant par la directrice de com servile et les "analystes" politique qui brassent davantage de vent que d’à-propos. Les dialogues sont souvent savoureux, pleins d’ironie et de méchanceté, mais le film va rarement plus loin que la boutade inoffensive (pour une analyse plus fine et plus intelligente du sérail, revoir L'exercice de l'État). En revanche, Sapin a eu du flair en enrôlant Alexandra Lamy et Finnegan Oldfield, elle géniale en prédatrice arriviste et vacharde, lui à l’aise en Rastignac qui s’ignore, et plus généralement un casting aux petits oignons (Philippe Katerine, Brigitte Roüan, Gilles Cohen…) qui, visiblement, s’amuse comme des fous à faire comme les "grands".