Les questions politiques et du pouvoir semblent passionner Pierre Schoeller, déjà au cœur des intrigues de son précédent film, L’exercice de l’État. De fait, il paraît presque naturel de le voir s’attaquer à l’un des plus gros morceaux de l’Histoire française : la Révolution. De la prise de la Bastille en juillet 1789 à l’exécution de Louis XVI en janvier 1793, Schoeller retrace les destins de femmes et d’hommes du peuple croisant ceux de figures historiques (Marat, Robespierre, Danton, Marie-Antoinette, Louis XVI…) lors de ces temps troubles où résonnaient, des rues crasseuses de Saint-Antoine au Manège des Tuileries, les mots justice et liberté, révolte et patriotisme.
Schoeller, tout en axant son scénario sur une période déterminée et jalonné d’épisodes emblématiques (déclaration des droits de l’homme et du citoyen, fuite du Roi à Varennes, fusillade du Champ-de-Mars, naissance de la première République française…), évite un développement trop académique des faits en privilégiant davantage des instants, des suspensions, des ellipses et des visions parfois hallucinées. Mais alors que le film sait cultiver cette singularité dans la chronique des événements, il échoue à y apporter un souffle et une envergure, du romanesque aussi (on pense par exemple à La reine Margot de Patrice Chéreau qui, lui, avait su donner à l’Histoire un sentiment d’urgence et de frénésie).
Le film est comme figé dans sa volonté et de bien faire (les costumes, les décors, les discours fidèlement retranscrits et d’une surprenante modernité), et de se démarquer. Le montage n’arrange pas les choses, passant trop méthodiquement des scènes "du peuple" à celles de la monarchie (les débats à l’Assemblée, les actions du Roi), comme si chaque "partie" se devait d’avoir un temps scrupuleusement imparti, à l’instar de chaque actrice et acteur d’un casting aux allures de parterre d’une cérémonie des César. Ambitieux mais inégal, Un peuple et son roi aurait presque gagné à se scinder en deux films distincts pour apporter plus d’ampleur au projet, et sans doute moins de frustration.
Pierre Schoeller sur SEUIL CRITIQUE(S) : L'exercice de l'État.