Il y a un peu plus de deux ans, Sébastien Marnier avait déboulé, dans ce qu’on appelle communément le "paysage du cinéma français", avec Irréprochable, thriller psychologique réussi que Marina Foïs, éblouissante, envoûtait tout en entier. Marnier revient à ce genre qui paraît lui aller si bien en y apportant cette fois une part d’étrange, et presque de fantastique. Menace sourde, paraboles cauchemardesques et signes précurseurs d’une éventuelle fin du monde accompagnent ainsi le parcours de Pierre Hoffman, professeur de français chargé de remplacer un collègue qui s’est défenestré auprès d’une classe pilote d’enfants surdoués de 3e, distants et étranges.
La principale réussite du scénario, adapté d’un roman de Christophe Dufossé, tient dans les échanges tendus entre Pierre et six de ces élèves qui semblent le manipuler et le harceler, s’en jouer très facilement, et taire aussi un secret qui les lie d’une façon que Pierre va tenter de découvrir et, éventuellement, de comprendre. Son enquête (puis son intervention) révèlera chez eux la tentation d’une pulsion de mort XXL, l’aveu d’une lucidité résignée face aux dérèglements de la Terre, à l’inconscience des hommes et l’impossibilité de l’avenir. La lecture d’un extrait de Sécheresse de J. G. Ballard, entre autres, renseignera sur leur vision radicale d’un monde voué à disparaître (un autre extrait pourrait également définir leur action : "À partir de maintenant, ils devraient inventer leur propre sens du temps hors du paysage qui les entourait").
C’est sans doute là que réside la faiblesse du film, celle d’en donner trop tôt les clés (et la surprise d’un épilogue apocalyptique n’y change rien), d’en dévoiler hâtivement enjeux et mystères comme par crainte d’égarer le spectateur pour finalement faire du surplace dans sa deuxième moitié (les différentes méthodes de suicide testées et envisagées par les six élèves deviennent vite répétitives et inutiles : on a compris le truc dès la première). Maîtrisé et intrigant (et puis Laurent Lafitte y est sensas), L’heure de la sortie commence comme une sorte de polar social (pourquoi ce professeur a-t-il voulu se tuer ? Jusqu’où ira ce sentiment prégnant de rapports de classe ? Pierre réussira-t-il à s’intégrer dans ce nouveau collège ?) dérivant vers le trip écolo-nihiliste certes singulier, mais auquel il manque un soupçon de trouble, un rien d’angoisse supplémentaires.