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Boy erased

Aux États-Unis, on ne condamne pas (plus) l’homosexualité. Aux États-Unis, on préfère remettre dans le "droit chemin" (comprendre l’hétérosexualité) les éventuelles "brebis égarées" dans des centres de thérapie de réorientation sexuelle. Aux États-Unis, trente-six états permettent encore, en toute légalité, ces thérapies de conversion sur des mineurs. Aux États-Unis, on peut donc "soigner" sa fille ou son garçon en lui lavant le cerveau, en lui imposant d’être quelqu’un d’autre et/ou en tapant dessus parce que cette fille ou ce garçon ne correspond pas au modèle d’une soi-disant normalité, sociale et surtout religieuse. Jared est l’un de ces garçons, fils de pasteur baptiste dont l’homosexualité est révélée à ses parents, lesquels décident de l’envoyer dans l’un de ces centres.

Inspiré du livre autobiographique de Garrard Conley, Boy erased déroule son programme d’observation et de dénonciation de ces pratiques en restant trop dépendant du sérieux de son sujet, comme si Joel Edgerton estimait qu’il se suffisait à lui-même par sa force et sa gravité, et qu’il était donc inutile d’en proposer autre chose qu’un film académique et sage. De fait, c’est tout l’inverse qui se produit. L’histoire édifiante de Jared (et de tant d’autres filles et garçons à travers le pays, et même à travers le monde) se retrouve complètement desservie par un manque d’audace et d’intensité. Alors que l’on devrait, au minimum, s’indigner du sort de Jared et de l’utilisation de la parole sacrée (faisant de l’homosexualité un choix décidé ou une maladie, au pire une perversion ou une abomination), on reste comme extérieur, à peine concerné par ce qui se passe à l’écran.

Même les acteurs semblent à la traîne, font correctement leur boulot mais sans étincelle, sans surprendre, excepté Russell Crowe en père tiraillé entre l’amour de Dieu et l’amour pour son fils. L’un des mérites du film est d’ailleurs de ne pas caricaturer les personnages (il y avait de quoi), du directeur du centre (qui, ironie du sort, se remariera plus tard avec un homme) aux parents de Jared, aimants et attentionnés, mais perdus face à quelque chose qui les dépasse, qu’ils ne comprennent pas, et comme prisonniers de leurs croyances. Boy erased aurait pu être un grand film, aurait pu marquer, aurait pu devenir une sorte de nouveau Boys don’t cry ou Moonlight, pourquoi pas. Voilà, c’est ça : il aurait pu.

Boy erased
Tag(s) : #Films

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