Avec toujours un joint (ou un bong) coincé entre les lèvres et un truc à boire à la main (bière, cocktail, verre de vin…), avec ses cheveux blonds décolorés et sa peau tannée par le soleil, Moondog traîne sa désinvolture et sa bonhommie parmi les bars et les villas de Key West ou de Miami. Poète et écrivain reconnu, Moondog fuit les conventions, ne s’attache à rien sinon à sa femme, sa fille et un hédonisme de tous les instants. Il est comme ça, Moondog. Il profite, il glande. Tout l’ébahit, tout le fait rire, tout le monde l’aime et il aime tout le monde. Et même quand un drame survient, et même quand il doit, sous la contrainte, se remettre à écrire, Moondog continue de tracer son chemin dans la bonne humeur et une forme constante d’insouciance.
Harmony Korine a fait de son (anti) héros une sorte de Big Lebowski de la côte Est, héritier d’un ADN littéraire (et existentiel) se partageant entre Charles Bukowski et Hunter S. Thompson, voire William Burroughs. À travers lui, Korine compose une ode à la fumette et à l’alcool, à la défonce et au lâcher-prise dans un monde saturé d’injonctions et d’informations, un monde qui a oublié de revenir à soi. Sans filet et quasi sans enjeux (une vague histoire d’héritage à récupérer), son film est un joyeux foutoir bigarré (le grand Benoît Debie, à la photographie, a encore frappé) qui assume à 300% son inconséquence et sa volatilité.
N’ayant finalement pas grand-chose à raconter (ni à montrer), Korine meuble comme il peut l’heure et demie de son film en inventant des micro-intrigues dont il semble lui-même se foutre royalement et des personnages qui viennent faire leur petit numéro devant la caméra, puis qui s’en vont (Jonah Hill en agent littéraire chelou, Zac Efron en pote de rehab, Martin Lawrence amateur de dauphins…). The beach bum vaut surtout pour sa décontraction (presque sa poésie) estampillée carpe diem et peace and love, et pour un Matthew McConaughey hilare et génial (et même émouvant) qui se fait manifestement plaisir à incarner ce "clochard de plage" cherchant à avancer au-delà des normes et du coma éthylique.
Harmony Korine sur SEUIL CRITIQUE(S) : Spring breakers.