Abonné désormais aux séries B douteuses qu’il enchaîne sans réel discernement, Nicolas Cage paraît vouloir déconstruire sa légende et sa carrière avec une désinvolture, une volonté presque touchantes. Si parfois quelques-unes parviennent à sortir du lot (Mom and dad, Le casse, et surtout le frappadingue Mandy), le reste n’est qu’une triste succession de navets indignes de son talent d’avant. Et ce Colour out of space, dont le buzz et le potentiel promettaient pourtant beaucoup (mais se résumant in fine à un machin situé quelque part entre un mauvais Brian Yuzna et un mauvais Tobe Hooper mâtiné d’un soupçon de The thing), ne va pas vraiment arranger une filmographie ressemblant désormais à celles de Van Damme, Lundgren ou Seagal.
Adaptation ratée d’une nouvelle d’H. P. Lovecraft, le film de Richard Stanley semble d’ailleurs surfer sur le phénomène Mandy dont il reprend certains éléments-clés (et les mêmes producteurs) : une forêt, une menace extérieure, du gros délire, du gore, beaucoup d’éclairages violets et Cage qui a droit à sa scène de pétage de plombs (dans la salle de bains dans Mandy, dans la cuisine et la voiture ici). De cette histoire d’une famille aux prises avec une entité extraterrestre immatérielle (une lumière dont la couleur serait en dehors du spectre visible) modifiant faune, flore, femmes et hommes de façon anarchique (la nature devient luxuriante, les animaux deviennent monstrueux, les humains deviennent fous, ce qui rappellera le Annihilation d’Alex Garland), Stanley ne garde que l’argument de base pour délivrer une espèce de gloubi-boulga des genres (horreur, bis, Z, sérieux, second degré, expérimental…) particulièrement indigeste.
Ramené sur quelques jours alors que la nouvelle s’étale sur plusieurs saisons, Stanley évacue cette lente progression dans la démence éprouvant chaque membre de la famille (ici un couple fade et ses trois enfants têtes à claques) au détriment d’un nanar speedé incapable de développer à son avantage la tension psychologique et horrifique de l’intrigue. Mal rythmé, mal écrit, mal interprété, même pas drôle malgré ses deux ou trois prétentions comiques (les alpagas, l’ermite baba cool, les rictus déjantés de Cage qui semblent contenter les fans sans qu’ils trouvent à redire sur le reste), Colour out of space réduit la terreur sourde lovecraftienne à un simple jeu de massacre certes jouissif par instants, mais globalement sans intérêt et qui cherche à en faire trop.