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Cette musique ne joue pour personne

Dans une maïeutique pop cherchant à réinventer la rhétorique kaurismäkienne au-delà de la figure cosmogonique du pince-sans-rire, ou plus sûrement celle, humaine, de l’autre, Samuel Benchetrit oppose ici les vides et les pleins d’un présent exsangue, et au-delà amoureux et familiaux, à un contexte artistique, voire surréaliste, que l’on n’attendait pas, soudain et tangible, et dont les conséquences, en premier lieu celle du dépassement, de la redécouverte de soi comme philosophie de l’espoir inaltérable, replacent les fondamentaux de l’existence ailleurs. Fondamentaux enfouis et inassouvis, inconnus et interrompus, et qui font siens la pensée de Platon qui prophétisa que "la vie est un court exil".

En cela, Benchetrit est un cinéaste plus intéressant qu’on ne le dit, développant un imaginaire teinté de non-sens assimilable directement aux habitus de la marge (celle de petits caïds, de malfrats vieillissants ou de loulous de seconde zone) ou même de notre époque. Le programme narratif de Cette musique ne joue pour personne confrontera ainsi ces habitus au devenir de l’art protéiforme (théâtre, poésie, chant…) et de l’amour résurgent (ce sont "des durs qui vont devenir des tendres, saisis par une tendresse qui les dépasse", a expliqué Benchetrit), sublimant en chacun des personnages la trace d’un anti-déterminisme sociologique propre à l’Humain apte à questionner et à s’adapter.

Nan mais j’déconne en fait. C’est juste tout naze, ce film. C’est juste pas inventif, c’est juste rarement drôle, c’est juste laborieux, et visuellement c’est d’une incommensurable laideur avec cette photographie "blanchie" et terne qui vous fout le bourdon. Benchetrit enchaîne platement une suite de saynètes inégales aux personnages sans substance, petits pions de son petit théâtre de l’absurde s’invitant dans le quotidien, puis finalement répétitives, dissimulant mal un récit qui, avec ses trop nombreux axes narratifs (au moins quatre) qu’il peine à agréger (sinon en les réunissant lors d’une "boum" finale, sorte de climax du pauvre), ne passionne jamais et ne mène nulle part. Cette musique ne joue pour personne certes, mais ce machin ne plaira à personne (ou à pas grand monde).
 

Samuel Benchetrit sur SEUIL CRITIQUE(S) : Un voyage, Chien.

Cette musique ne joue pour personne
Tag(s) : #Films, #Cannes 2021

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