Fei est jeune, Fei est beau, Fei vient d’un petit village pauvre de Chine, et Fei se prostitue dans une grande ville où, lors de sa première passe, il rencontre Xiaolai. Une rencontre qui, sur plusieurs années, chahutera son existence qu’il devra affranchir de tant de contraintes… Si Moneyboys, dans ses premières minutes, semble vouloir dresser le portrait de prostitués dans une Chine contemporaine où l’homosexualité, décriminalisée depuis 1997, souffre pourtant d’une parole et d’une visibilité de plus en plus censurées (sans parler d’une acceptation toute relative), il prend rapidement la tangente pour aborder d’autres thèmes et établir une sorte d’état des lieux amoureux plus universel (ici l’amour est dans tous ses états, empêché, tarifé, arrangé, perdu ou indécis).
Car ce qui intéresse d’abord C.B. Yi, ce sont ces liens et ces rapports circulant toujours entre les êtres, qu’ils soient familiaux, sociaux ou affectifs (amoureux donc). De fait, les différentes trajectoires des personnages ne cessent de se croiser, d’interagir, de s’éloigner aussi pour se recroiser plus tard, mais cherchant, toutes, à se libérer du passé ou, au mieux, à faire avec. Et de ce que la société chinoise, mais comme beaucoup d’autres, impose à sa jeunesse en termes de traditions, d’attentes sociales et familiales. De fait, comment parvenir à être soi-même, à quels moments (la scène de danse finale, magnifique, où Fei, soudain, "lâche prise") ? Comment s’accepter quand les pressions, de toutes parts, vous poussent à esquiver, à supporter, à ne pas dire ?
C’est très certainement de là que vient le problème du film : vouloir évoquer trop de choses, se perdre dans trop de sujets (certains intéressants quand d’autres anecdotiques), et sans jamais réussir à atteindre une forme de fluidité dans la narration. D’où ce sentiment d’un film qui se construit par à-coups, qui s’emboîte mal, et dont l’intérêt se dilue sans cesse. D’un film contre lequel le spectateur bute, dans lequel il n’arrive pas à rentrer malgré une approche stylistique séduisante. Si on y ajoute plusieurs acteurs dont l’interprétation frôle parfois la faute de goût, voire l’amateurisme, et jusqu’à en désincarner leur personnage dont le sort indiffère, Moneyboys déçoit tout du long sans que ses quelques et beaux éclats y changent quelque chose.