On était quand même un peu (beaucoup ? À la folie ? Pas vraiment ?) curieux de voir à quoi pouvait ressembler la première réalisation de Dev Patel, qui a bien grandi depuis Slumdog millionaire (16 ans déjà). Et puis transposer la légende du dieu singe Hanuman, divinité hindoue symbole de sagesse, de force, de courage, de dévotion et d’autodiscipline (oui oui, tout ça en même temps) et metteur en garde contre "la nature précaire d’un pouvoir débridé", dans notre monde actuel avait de quoi intriguer, et davantage en décidant d’en faire un film d’action décomplexé qui lorgnerait, ça a été dit et répété et seriné absolument partout, du côté de John Wick (mais en mieux).
Le truc en plus ? Patel, malin comme un singe (soupir + yeux levés au ciel), y apporte une vision culturelle, ose la critique politique (toute proportion gardée bien sûr, ici on n’est pas dans le pamphlet brûlant, plutôt dans le gentil coup de patte). Car si Monkey man peut facilement se résumer à une énième histoire de vengeance (un boxeur clandestin raté se rapproche de la pègre dans l’espoir de punir ceux qui ont assassiné, sous ses yeux, sa mère alors qu’il n’était qu’un enfant), il offre en parallèle une relecture du mythe d’Hanuman (son récit, ses symboles, ses valeurs), et dénonce à sa façon la corruption endémique qui gangrène la plupart des institutions en Inde, ainsi que le rejet et les violences perpétrés à l’encontre de la communauté des Hijira.
Mais pas d’embrouilles, point de surprises : c’est l’action qui prime avant tout. Là-dessus Patel met le paquet, sa caméra est en mode hystérie (parfois trop), en mode jeu vidéo (parfois trop aussi), saisissant comme une sorte d’urgence, de frénésie dans la quête (et dans la tête) de son héros. Ça donne un côté shaky qui ne rend pas vraiment justice aux chorégraphies de bastonnades et aux poursuites. Et puis ça fait tout-venant, copié-collé, déjà vu (le trauma d’enfance, les flashbacks gnangnans, l’infiltration incognito dans le repère des très très méchants avec boss final à éliminer…). Mais c’est fait avec une telle générosité, une telle démonstration d’énergie que l’on pardonne à Patel, dans la mesure du raisonnable, de n’avoir rien fait d’autre, in fine, qu’un produit standard qui, au fond de lui, aurait un petit supplément d’âme.