Une bombe explose gare d’Austerlitz, attentat meurtrier apparemment commandité par un groupe terroriste dans la mouvance d’Al-Qaida. Un jeune hacker, qui a piraté toutes les caméras de contrôle dans Paris, va très vite s’apercevoir que les coupables ne sont pas ceux que l’on croit et dévoiler une réalité plus effroyable. Premier film de Cédric Jimenez, scénariste et producteur de films carrément oubliables (Scorpion, Eden log), Aux yeux de tous est une relative bonne surprise visuellement excitante, mais scénaristiquement très faible, l’intrigue développant un énième complot politico-financier à base de magouilles d’États, d’engrenage infernal et de tueurs sans pitié.
Le parti pris cinématographique, en revanche, est intéressant, jouant sur nos peurs, nos lubies et nos carcans ultra-sécuritaires. Caméras de surveillance, webcams, écrans d’ordinateurs, le film construit un langage et un look esthétiques entièrement envisagés à travers d’autres supports vidéo, les seules séquences filmées "comme au cinéma" étant celles dans la chambre du hacker. La première scène du film est, de ce point de vue, très réussie, et met directement dans l’ambiance, rappelant (toutes proportions gardées) le Snake eyes de Brian De Palma où l’image, via un regard extérieur (un autre média), est analysée, désassemblée et décortiquée pour l’instauration d’une nouvelle vérité.
À l’heure d’une surinformation en temps réel, d’une survisibilité citoyenne (Instagram, YouTube, Facebook, Twitter…) et d’une révolution web initiée par les trublions d’Anonymous, Aux yeux de tous surfe sur l’effervescence numérique actuelle où tout devient possible en quelques clics (et sans vraiment plus étonner personne). Malgré ses travers, on a envie de défendre le film de Jimenez parce que son projet de fond est assez singulier (à défaut d’être complètement vraisemblable) et son rythme captivant. Tant pis alors si les personnages restent peu développés et si l’interprétation est parfois bof : Mélanie Doutey semble plus à l’aise dans le registre de la comédie (Clara Sheller) et Olivier Barthelemy, qui pourtant en imposait dans Notre jour viendra, révèle ici un jeu limité. Une réussite mineure donc, mais c’est déjà pas si mal.