Ode à la décrépitude, à la maladie, autoportrait faussement impudique, cru et théâtral : derrière ce titre à la Mylène Farmer, Nolot raconte le quotidien terne d’un homosexuel de 58 ans et décrit celui d’un milieu (en le généralisant à peine) où le désir et l’attrait provenant de l’autre se circonscrit à 30 ans, et où la vieillesse est perçue comme une première mort. Le scénario met en avant toute la logistique financière inhérente à un âge où souhaiter, désirer et vouloir se fait nécessairement avec des billets parce que le corps vieux n’est plus attractif dans un environnement prioritairement axé sur la beauté et le jeunisme. C’est tout un train-train tarifié qui s’expose alors avec une politesse aiguë du désespoir : faire ses courses, payer le psy, les restaurants, les gigolos, un peu d’amour, un peu de sexe, compter et re-compter… Au-delà de la description mordante d’une routine morne et ultra pécuniaire, Nolot se met en scène en écrivain bloqué, harassé par la peur de la trithérapie.
Son seul espoir d’échapper à ce réel d’exclusion semble être de s’oublier dans la nuit et dans le noir du sexe ; travesti en femme, il disparaît dans les limbes d’un cinéma porno de Pigalle, achevant son film par là où commençait son précédent (le magnifique La chatte à deux têtes). Le scénario sait plaire et dérouter, parfois amuser, mais la mise en scène est trop étriquée, trop renfermée, trop sage. Nolot paresse, musarde, filme jusqu’à l’abrutissement ses journées interminables assis à son bureau ou au restaurant. Filmer l’ennui en ennuyant est peu approprié, peu pertinent ; l’indolence exaspérante qui verrouille son film sape l’attention du spectateur qui passe à côté de la portée analytique et descriptive d’une vérité sans fard.