Début octobre 2007, Arte diffusait un terrible reportage lors d’une semaine thématique intitulée Démocratie pour tous. Un taxi pour l’enfer enquêtait sur la mort d'un jeune conducteur de taxi nommé Dilawar. Vendu comme terroriste par des miliciens Afghans à l'armée américiane, sans jugement, sans avocat et sans défense, il sera torturé à mort dans la prison militaire U.S. de Bagram et décèdera 5 jours après son arrivée. Reconnu innocent, sa dépouille sera rendue sans explication à sa famille. À travers le cas de cet anonyme pris dans la tourmente d’une guerre, le reportage décortique les rouages et la chaîne de responsabilités qui ont aboutit à ce cas précis, et accuse l'usage systématique (et vain) de la torture par l'armée américaine sur des supposés combattant ennemis.
Détention secrète dénonce les mêmes faits de façon romancée et didactique, et d’un "point de vue" américain cette fois-çi. Un ingénieur, d’origine égyptienne, est pris pour un partisan terroriste. Il est enlevé par la CIA et conduit dans une geôle marocaine où il est interrogé et torturé sur ses supposés liens avec un fou de Dieu local.
Le film, démonstratif et lisse, a une volonté louable de bien faire (d’ailleurs soutenue par Amnesty International), même si sa nécessité a quelques longueurs de retard sur l’actualité. En filigrane d’un scénario sans surprise (et dont le twist final n’apporte rien, dénaturant plus ou moins le propos général au profit d’un suspens inutile), des thèmes essentiels sont brièvement abordés : art du compromis en politique, "rentabilité" zéro de la torture, mécanisme de répression entraînant des vocations vengeresses, jusqu’où aller pour sauver la vie d’innocents, comment définir une démocratie aujourd’hui.
Celle de l’Amérique est ici exposée comme un système d’État défensif et paranoïaque, prêt à tout, dans l’ombre, pour servir et protéger ses citoyens et ses intérêts (rappelant les grands thèmes souterrains de 24). Anwar El-Ibrahim se retrouve entraîné dans un engrenage global où plus personne n’est réellement capable de discerner le vrai du faux, où tout est constamment remis en question et où, finalement, tout reste en situation de crise constante sans véritable fin possible. Honorable, le film de Gavin Hood pêche par son manque de carrure, et sa portée dénonciatrice reste trop conventionnelle et trop hésitante.