Dès fois dans la vie, on se pose plein de questions vachement importantes : "Ai-je bien fait de lui parler sodomie le premier soir ?", ou bien "Le look carré déconstruit mais chic : hyper tendance ou revival dépassé ?", ou encore "Comment un tel film a-t-il pu être pensé, financé, réalisé et distribué ?", ce qui amène directement à la question "Pourquoi suis-je allé voir cette merde ?". Histoire d’empêcher les gens de rentrer dans une salle de cinéma qui projette ce machin, je spoile la fin à mort : le personnage de Gerard Butler meurt carbonisé dans sa cellule de laquelle il pouvait sortir grâce à un tunnel, piégé par un Jamie Foxx devenu le bras droit armé de la Justice américaine dans un relent putassier de moralité crasse et une big explosion joliment purificatrice (tu grilles, donc tu expies). On imagine très facilement les white trashdu Texas ou du Wyoming applaudir à deux mains bien que l’une soit fermement posée sur leur flingue et l’autre sur la Bible.
Pourtant le film avait un bon potentiel de départ (un type décide de punir, dix ans après, tous ceux qu’il tient comme responsables, directs ou indirects, de la mort de sa femme et de sa fille), et le genre "loi du Talion" et "vengeance aveugle" a donné auparavant des œuvres désormais cultes (Le vieux fusil, Les nerfs à vif, Irréversible, Kill Bill, Old boy…), mais aussi pas mal de nanars bien gras dont plus personne ne veut avoir à se rappeler, même complètement bourré.
Voir Butler, bien gras aussi, devenir une sorte de Dexter/Jigsaw/John Doe/Lecter (oui oui, tout ça en même temps) en train de zigouiller les plus éminents représentants de la Loi (avocat, procureur, juge, maire) a quelque chose de jouissif tant que le film ne se prend pas au sérieux (la scène du meurtre d’un prisonnier, assez impressionnante), demeure une série B bête et méchante et ne s’empêtre pas les pieds dans une thèse fumeuse qui semble vouloir dénoncer à la fois le système pénal américain, la peine de mort et l’autodéfense en exposant le contraire infirmé/affirmé des apodioxes avancées, mais réfutant l’opposé antithétique du discours concordant. En gros : what's the fucking point?
Cousu de fil blanc avec de grosses, très grosses ficelles, involontairement drôle, franchement ridicule, finalement tout pourri, Que justice soit faite, sorti depuis des lustres aux States et inexplicablement importé jusqu’à nos salles obscures (le streaming, c’est pas pour les chiens, bordel), sous un discours confus et racoleur, est prétexte à du grand n’importe quoi sympathique deux minutes. Pour une vraie réflexion sur les institutions du droit et leur remise en cause profonde, on repassera. Pour un vrai thriller crédible, efficace et prenant, et bien on repassera aussi.