[REC], sans être complètement abouti, tire sa force principale de son ambiance claustrophobique et du confinement dans un immeuble plongé dans une quasi-obscurité. Quelques sursauts font bonne impression, mais Plaza et Balaguero jouent principalement la carte de l’effroi de situation (peur instantanée de ce que l’on voit, et non de ce qui surprend). Le film est plus convaincant, plus intimidant dans ces moments-là, dans ces rares secondes de scènes où rien ne se passe réellement, mais où l’horreur est montrée plein cadre sans effet ostentatoire : vieillarde ensanglantée recluse dans un coin d’appartement, fillette contaminée que personne n’ose approcher, créature de l’enfer arpentant un grenier…
Le défaut majeur du film est sa construction bancale. Si la tension monte progressivement, elle retombe malheureusement bien souvent, cet effet de "balancier" desservant le climat d’oppression recherché par les deux réalisateurs. Les quelques soubresauts gore de mi-parcours sont noyés dans une installation qui perdure avec trop d’insistance (la longue scène centrale dans l’atelier fait indéniablement retomber le malaise des premiers frissons). Conséquemment, la mise en place ne dure pas quinze minutes, mais une bonne heure, et c’est uniquement dans la dernière demi-heure que les choses s’emballent enfin et que le film frôle la panique générale. Quand aux cinq dernières minutes, elles sont réellement éprouvantes, pur exercice de style dans le noir complet avec une créature vraiment effrayante parce qu’encore trop humaine.
L’autre (grande) erreur de [REC] est sa tendance à vouloir justifier et signifier le tout : les révélations finales, accessoires et maladroites, arrivent comme un cheveu sur la soupe. Le film de terreur gagne souvent en épouvante quand il sait jouer sur le non-dit et la suggestion (Alien, L’exorciste, Funny games, Le projet Blair Witch) ; ici, en sur-expliquant le pourquoi du comment, Plaza et Balaguero désamorcent l’angoisse et le mystère, cette peur ancestrale de l’inconnu et du noir, voire même la fiabilité d'un scénario qui savait se montrer habile et "réaliste" du fait de ses zones d’ombres. [REC] cherche un peu trop le consensus, le coup d’éclat anthologique, le brio conceptuel et grand public. Davantage de concision et de radicalité en aurait certainement fait une œuvre plus viscérale, évitant les pièges de ses propres ambitions et les codes déjà usés du faux documentaire censé montrer une réalité devenue soudain inquiétante.