Pour ceux (dont je fais partie) ne connaissant pas grand-chose à la vaste et nébuleuse mythologie trekkienne, mais plus certainement à l’univers de ce petit malin de J. J. Abrams, cet antépisode de Star Trek donne le sentiment d’un gigantesque pudding à la crème que l’on dévore avec un plaisir coupable et sans vraiment se poser de questions, abruti par tant d’emphase visuelle et sonore, de dialogues cons et de morale lénifiante. C’est cliché à mort, bourré d’invraisemblances et usé jusqu’à la corde (déjà bien usée) dans sa vision ultra-manichéenne du monde, soit des méchants très méchants (visiblement des Maoris fans de Lordi) contre des gentils super gentils et jeunes et beaux et intelligents et qui savent déjà piloter un super vaisseau.
Histoire de dire n’importe quoi sur ce grand n’importe quoi filmique et scénaristique, capharnaüm grandiloquent synthéisé à outrance, on pourrait se pencher sur l’aspect éventuellement crypto-gay du film, à savoir la relation tendue entre Kirk et Spock : Chris Pine (forcément, avec un nom pareil…), allure de bellâtre top bourrin et tout terrain, face au vrai-faux sensible Spock, toujours parfaitement coiffé, coincé, un peu précieux et très proche de sa maman. Ces deux-là ressemblent à un vieux couple passant son temps à se tirer dans les pattes, à se reluquer et à s’engueuler, et c’est moi qui m’assieds dans le fauteuil du commandant, et pourquoi tu ne suis pas mes ordres, et je serais ton ami pour l’éternité, et je t’ai vu mater ce Klingon…
Le film charrie au tractopelle son lot de pathos et de valeurs tellement obsolètes (sacrifice, dépassement de soi, choisir et croire en son destin…) que plus personne aujourd’hui n’oserait les porter ainsi à de telles nues, à part Michael Bay a priori, mais J. J. y croit à fond lui aussi. Avec cette ferveur fervente qui l’habite profondément, il parvient à rendre certaines scènes spectaculaires (la descente en chute libre le long de la foreuse, par exemple) et le look de son film, dans l’ensemble, est plus que réussi (le vaisseau des Romuliens, casting à la ressemblance adéquate, belle photographie de Dan Mindel…).
Nanar hype mais pas reboot prodigieux, le nouveau Star Trek, avec ses faux airs d’un Starship troopers édulcoré au Kärcher, mélange les tics et trucs abramsiens (Alias et Lost, références obligées) au space opera plus kitsch que vraiment trekkien. Difficile donc de s’y retrouver, et finalement d’y trouver un quelconque intérêt autre qu’un divertissement roublard et pompier se limitant à cinq ans d’âge mental.
J. J. Abrams sur SEUIL CRITIQUE(S) : Alias, Mission : Impossible III, Super 8, Star Trek into darkness, .