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Welcome

Horizons du cinéma français 1/7 - Drame social


Welcome est une œuvre sincère sur le thème de la (re)conquête, celle de soi, de son estime, de sa dignité, celle aussi de l’être aimé que l’on tente de rejoindre ou de séduire à nouveau, et celle enfin d’un possible ailleurs, d’un Eldorado promis mais se dérobant sans cesse à une incarnation. La démonstration d’une politique d’immigration insoluble est presque secondaire (et allant de soi évidemment), en revers d’un fondement beaucoup plus ancré sur les sentiments humains. C’est d’ailleurs de cet enjeu intime (l’amour porté à l’autre) que découle la divulgation syncrétique de la condition des clandestins à Calais.

Le film expose simplement la complexité d’un système avant tout répressif, d’un engrenage international n’ouvrant que sur des discordes, des conjonctures inextricables, et n’offrant aucune issue décente à la situation, parfois absurde, toujours tendue. Rien n’est idéalisé, rien n’est stigmatisé (sauf peut-être la vision caricaturale du voisin délateur), le scénario ne cherchant pas, héroïquement, à donner des solutions ou à faire la morale. Il témoigne plutôt de tous ces petits renoncements, de toutes ces indifférences qui, au quotidien, finissent par aboutir à un désistement citoyen (que chacun a le droit de justifier ou de condamner), à la déroute d’un État englué dans certaines mesures européennes, et ce malgré l’engagement collectif de beaucoup, le plus souvent accompagné d’une cruelle lucidité face à cette débâcle humanitaire et administrative.

Il est donc regrettable, au regard de cette belle humilité, de cette exposition sans fard d’un problème actuel, que le film demeure trop sage, trop discipliné, se mettant rarement en danger en dépit d’une fin sans compromis et de quelques scènes intenses (Bilal perdu en pleine mer au milieu de cargos géants). Tout est obligeant, courtois, presque consensuel dans cette façon de rapporter un fait de société sans parvenir à se débarrasser d’une envie de bien faire, de plaire absolument. On en oublie dès lors ce qui semble évident, crucial, important. Le film suscite des commentaires immédiats, des questionnements individuels, mais s’oublie une heure après parce que rien n’a réellement marqué, touché, induit. L’émotion et la révolte sont là, mais comme retenues, prisonnières de l’écran ; Welcome reste prompt à satisfaire, sans trop heurter ni contrarier, les dimanches soirs paisibles de l’audiovisuel public. Atone mais engagé, il confronte les drames secrets aux douleurs d’un contexte social difficile, et laisse voir l’impasse inéluctable d’un pays "prêt" à accueillir la misère, l’urgence et le désarroi, mais sans pouvoir les résoudre ni les assumer au moins dignement.

Welcome
Tag(s) : #Cycles

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