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Yossi

Depuis sa jolie Bubble en 2007 (sans oublier son très beau Tu marcheras sur l’eau en 2004), Eytan Fox avait complètement disparu de la circulation (en France en tout cas). Il revient aujourd’hui avec une suite de son Yossi et Jagger sorti en 2002, concentrant cette fois son film sur le personnage de Yossi, dix ans après les événements qui ont vu mourir son amant dans ses bras. Yossi n’est toujours pas parvenu à faire son deuil, à oublier Lior dont le souvenir le mine, le ronge et l’assaille. Yossi se plonge dans son travail (il est cardiologue), ne sort pas, est triste, solitaire, dépressif, et s’est empâté (l’acteur Ohad Knoller a méchamment pris depuis The bubble). Sa rencontre inattendue avec un groupe de quatre militaires, et surtout avec Tom, l’un d’entre eux, va peu à peu lui redonner un certain goût de vivre.

La mort, l’amour, le désir, l’acceptation de soi, Fox parle de tout cela dans Yossi, et si le film s’autorise à évoquer des sujets existentiels universels, il raconte avant tout l’histoire d’un seul homme qui revit soudain, lentement. Un homme qui entreprend sa reconstruction au contact d’une sensualité retrouvée, à l’instar de Gustav von Aschenbach dans Mort à Venise quand il découvre et convoite le jeune Tadzio (mais si cette rencontre mène von Aschenbach à sa perte, au contraire elle régénère Yossi), et c’est justement l’œuvre de Thomas Mann que Yossi lit au bord de la piscine ou écoute dans sa voiture (la Symphonie n°5 de Mahler, immortalisée par Visconti dans son film), figure projetée d’un être à l’agonie qui tente de se ressaisir dans un sursaut tardif. Deux parties s’imbriquent ainsi (le quotidien et ses rengaines, le voyage cathartique vers le Sinaï) jusqu’à un final apaisé où Yossi, assis face à la mer comme von Aschenbach, envisage enfin un possible avenir.

Le film se regarde simplement et sans ennui, mais n’apporte rien en soi, ni émotions ni surprises, déroulant un scénario linéaire à peine troublé de quelques scènes magnifiques (le plan cul qui tourne à l’humiliation, la balade en voiture avec les militaires…). Le film est attachant comme tout, mais il ne reste pas, n’arrache rien. Il y a quand même une très belle scène, vers la fin, qui vient soudain nous cueillir alors qu’on n’attendait plus grand-chose, celle dans la chambre d’hôtel où, face à la beauté juvénile de Tom, Yossi doit se mettre à nu, chancelant d’un coup d’exposer son corps lourd dans la lumière, essoufflé par l’effort, frappé par la dureté du geste. Un petit film touchant, discret et sans manière, mais qui manque de pas mal d’envergure, d’un grand geste libre de cinéma.


Eytan Fox sur SEUIL CRITIQUE(S) : The bubble.

Yossi
Tag(s) : #Films

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