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Pacific rim

Sérieux : des robots et des monstres géants qui se tatanent pendant plus de deux heures, moi à la base je suis preneur. C’est l’avantage (?) d’avoir grandi avec Goldorak, Spectreman et X-Or dont Pacific rim pourrait être une sorte de dérivé contemporain. Certes, pas de Docteur Gori ou de Grand Stratéguerre à l’horizon, mais les monstres de Pacific rim peuvent éventuellement être comparés à des Golgoths et des Monstrogoths nouveau genre avec, pour chacun, un moyen de défense et une catégorie de dangerosité. On se disait donc qu’on tenait là un vibrant hommage aux sentai et aux films de monstres japonais (les kaijū eiga) qui ferait oublier l’affront de Cloverfield et des Godzilla de Roland Emmerich et de Gareth Edwards.

On se disait aussi que Guillermo del Toro allait faire la nique à Michael Bay et ses Transformers. On se disait aussi que les jaegers allaient en avoir une plus grosse qu’Optimus Prime ou Bumblebee. On se disait aussi que ce serait marrant d’imiter un kaijū dans sa baignoire en rentrant. On se disait plein de trucs en fait… Mais ça, c’est ce qui nous a été vendu par des marketeux pour qui le cinéma se résume à YouTube et des figurines chez McDo. Ça, c’est ce qui a été ardemment souhaité par de grands enfants comme moi encore bloqués à Bioman. Ça, c’est dans le meilleur des mondes du meilleur de la Terre, mais comme on vit dans un monde de merde, et bah t’auras un film de merde, connard.

T’auras un ramassis de poncifs à la pelle (le frère du héros qui meurt sous les yeux dudit héros, l’outsider recruté à nouveau, la rivalité masculine entre soldats, le capitaine qui retourne au combat, etc, etc. On notera également que ce sont les Chinois et les Russes qui sont envoyés au front en premier et se font laminer les boulons en deux secondes). T'auras du degré zéro en termes d’enjeux narratifs. T’auras des situations plus convenues les unes que les autres (tout se devine et se prévoit des scènes à l’avance), des dialogues écrits par des sous-traitants tamouls ou roumains, et deux scientifiques têtes à claques complètement inutiles et, surtout, JAMAIS drôles.

De la part du réalisateur d’Hellboy et du Labyrinthe de Pan, ça fait vraiment désordre, ça fout un coup. D’ailleurs Bay aurait réalisé cette bouse que les critiques lui seraient tombées dessus sans pitié. Mais del Toro jouissant d’une aura quelque peu auteurisante, elles semblent tout lui pardonner, ferment les yeux et s’assoient sur leur crédibilité (la palme à Télérama qui parle de fusion avec Freud… Et pourquoi pas avec l’utilisation du mythe chez Platon ?), remettant à peine en cause les faiblesses du scénario, sa structure foireuse et la platitude des personnages qu’elles auraient, chez d’autres, prestement vilipendées. Ça commençait pourtant pas mal, mais après quinze minutes plutôt prometteuses, tout s’écroule.

S’ensuivent plus d’une heure de blabla et de séquences insipides où, réduit à ronger son frein et à rêver d’autodafés cinématographiques, on attend désespérément les bastons promises, dantesques et colossales, et quand elles arrivent enfin (il n’y en a que deux, celle à Hong Kong et celle dans les profondeurs du Pacifique), il est déjà trop tard. Trop tard parce qu’on a fini par débrancher le peu de cerveau qui nous restait encore à force de nullité scénaristique, de psychologie neuneu (on s’y attendait forcément avec ce style de blockbuster, mais à ce point-là…) et d’acteurs tous très mauvais (en particulier Charlie Hunnam), pas super aidés, avouons-le, par des kilomètres de tirades débiles.

Ces fameuses bastons ont beau être époustouflantes et nous en mettre plein la vue, le désastre qui a précédé a trop sapé notre bonne volonté pour que l’on puisse s’en émerveiller malgré les couleurs chatoyantes et l’impeccable direction artistique. Et puis après, il faut tenir jusqu’au final décevant (ah oui, un petit détail les gars : une énorme charge explosive qui pète au fond de l’océan, ça-pro-vo-que-un-tsu-na-mi) en se tapant d’abord deux discours gluants de moralisme (celui du marshall et celui du père avec son fils) comme on osait plus en faire. Il manque à del Toro ce qui fait le vrai plus de Bay, éternel bourrin qu’on aime bien quand même et qui, un jour, sera enfin réhabilité : une sacrée dose de dérision, du clinquant partout et du foutage de gueule qui tache.


Guillermo del Toro sur SEUIL CRITIQUE(S) : La forme de l'eau.

Pacific rim
Tag(s) : #Films

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