Ils ont fui les atrocités et les massacres de la guerre, chez eux, au Soudan. Ils ont traversé des terres, traversé la mer où leur fille s’est noyée, pour finalement se retrouver là, en Angleterre, sous statut de demandeurs d’asile, dans une maison délabrée, en attente de devenir citoyens de ce pays qui les a recueilli. Alors ils attendent, dans cette maison, dans cette ville sinistre, sans pouvoir faire grand-chose parce que soumis à de nombreuses conditions (ne pas rater les entretiens hebdomadaires, ne pas travailler, pas d’animaux, pas d’invités, pas de fêtes, dire bonjour à ses voisins…). Rial et Bol (Wunmi Mosaku et Sope Dirisu, épatants) doivent attendre et, de cette attente, esprits et démons intérieurs vont largement profiter. Profiter pour les tourmenter, les confronter surtout aux traumatismes vécus, aux morts côtoyés et à cette "dette" qu’ils doivent désormais régler.
Pour son premier long métrage, Remi Weekes parvient à conjuguer le genre horreur à la réalité de ces femmes, hommes et enfants cherchant, au péril de leur vie, à échapper à la famine, aux conflits armés et à la mort. Une horreur qui s’avère avant tout intrinsèque, nourrie du vécu de Rial et de Bol. D’ailleurs Rial expliquera qu’elle ne peut avoir peur des fantômes après ce qu’ils ont enduré et parce qu’elle a vu le pire, pire que la légende de l’apeth, ce sorcier qui consumerait les êtres de leurs offenses, que lui racontait sa mère. Le pire, c’est cette folie des hommes dont ils ont été témoins. Cette folie qui gagne Bol face à l’invisible, à ce qu’il ne veut pas voir et qui pourtant investit (altère) aussi bien son âme que la maison.
Weekes avait ainsi toute latitude, à l’instar de Robert Eggers, Trey Edward Shults ou Ari Aster, d’illustrer cette horreur qui puise dans l’intime en privilégiant la suggestion, le peu d’effets, une ambiance. À la place, Weekes se limite un peu trop à du déjà-vu, à de la grosse ficelle : jump scares et apparitions/disparitions soudaines de silhouettes en arrière-plan, plein cadre ou surgissant de l’obscurité (sans parler de ce final attendu, raté et assez laid). Weekes se montre finalement plus convaincant (et pertinent) quand il filme, sans vouloir effrayer à tout prix mais d’abord à faire froid dans le dos, une salle de classe jonchée de cadavres, des bruits dans un mur ou Rial se perdant dans une ville dont les rues deviennent comme un labyrinthe. Ambitieux mais pas complètement abouti, original dans son sujet mais beaucoup moins dans son traitement, His house s’avère in fine plus dramatique qu’horrifique dans l’étude de ce couple déraciné, prêt à se reconstruire malgré le poids du passé et l’incertitude du présent.