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L'étrange Noël de Monsieur Jack

De l’art animé 5/7 - Stop-motion [Critique rédigée par Alex]
 

Metteur en scène excentrique et déglingué, artiste de génie à l’imaginaire grouillant et cafardeux, souvent incompris mais toujours adulé, Tim Burton s’est illustré dans son art en proposant, aux travers de nombreuses œuvres poétiques et cauchemardesques, un spectacle inventif à la limite de l’horrifique entremêlant malicieusement exigences commerciales (encombrantes parfois) et esprit barré.

Conte insolite, alliance sublime d’onirisme malsain et de merveilleux enchanteur, cet Étrange Noël de Monsieur Jack dissimule, sous ses airs enfantins, les thèmes et les effets symptomatiques de l’univers Burton. La quête initiatique, l’intégration sociale et l’acceptation de soi (éléments burtoniens récurrents), sont ici représentées via des figures absurdes et fantasques, notamment en la personne de Jack Skellington (effrayant épouvantail squelettique), métaphore simple et touchante de "l’étranger" incompris, rejeté par une société renfermée sur elle-même paraissant se refuser à accepter ses défauts et sa marginalité. Jack sera brutalement renvoyé (à coup de canons) là d’où il venait, dans sa Halloween Town noire et biscornue. Mais de cet échec, Jack aura tiré les plus belles et les plus évidentes leçons, découvert l’amour (en la personne de Sally) et les joies féeriques de Noël.

Bijou exceptionnel et innovant (l’utilisation en continu du stop-motion était alors une première pour l’époque), magnifié par la réalisation délicate d’Henry Selick qui s’inspire des codes de la littérature fantastique britannique du XIXe siècle, et aussi des figures expressionnistes allemandes des années vingt, L’étrange Noël de Monsieur Jack fait côtoyer astucieusement le gothique baroque à la pure magie enfantine. Selick mise surtout sur un macabre impressionniste (que l’on sait cher à Burton) grâce à des décors grandiloquents et cabossés (manoirs et stèles funéraires tordus, citrouilles terrifiantes, magnifique colline en spirale…) et des personnages extravagants (nous offrant, au passage, l’une des plus monstrueuses parades de ces dernières années) : maire schizophrène, chérubins vicieux, docteur à la limite du savant fou… Il y a aussi ce gros patapouf d’Oogie-Boogie, sac à patates débonnaire et méchant, sorte d’allégorie de l’enfer du jeu.

L’étrange Noël de Monsieur Jack est aussi une comédie musicale déjantée : Danny Elfman, visiblement très inspiré par son sujet, livre l’une de ses bandes originales les plus ensorcelantes (envolées inquiétantes, partitions groovy), apportant à l’ensemble un second degré plein de vitalité. Débordant d’ingéniosité esthétique, ce véritable joyau d’animation stop-motion est une nouvelle réussite de l’auteur de génie qu’est Tim Burton.

L'étrange Noël de Monsieur Jack
Tag(s) : #Cycles, #Animation

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