C’est en juin 2007 qu’est annoncée une éventuelle suite, si succès financier il y a, à 28 semaines plus tard, deuxième (et meilleur) volet de la saga réalisé par Juan Carlos Fresnadillo avec une intro restée dans les mémoires. De retards en doutes créatifs, d’abandons en problèmes de droits, cette suite va mettre plus de quinze ans à voir le jour. Danny Boyle à la réalisation, Alex Garland au scénario et Anthony Dod Mantle à la photographie : l’équipe de 28 jours plus tard se reforme à l’occasion de ce troisième opus, tandis que Cillian Murphy coproduit le film à défaut de jouer dedans en reprenant le rôle de Jim qui, en 2002, le révéla au grand public. Plutôt que de (re)partir sur ce que promettait la fin de 28 semaines plus tard (une possible épidémie mondiale, du moins européenne, du moins française), 28 ans plus tard va resserrer son intrigue sur un bout de presqu’île, quelques hectares de forêt et un noyau familial en proie à la maladie de la mère, quand le père, lui, décide qu’il est temps pour son fils de 12 ans, Spike, d’aller se confronter aux "infectés" et d’apprendre à les tuer en bonne et due forme.
On appréciera, ou pas, cette espèce de pied de nez narratif qui vient saper nos attentes (mais quelles étaient-elles, en réalité ?), en n’oubliant pas que 28 semaines plus tard, lui aussi, concentrait son histoire autour d’une famille dont la mère s’avérait être porteuse saine de ce "virus de la fureur". Bref. Boyle et Garland, à travers le récit initiatique de Spike, cherchent à évoquer à la fois le Covid, le Brexit, le masculinisme, la mort, l’amour maternel (ça commence à faire beaucoup) et une Histoire va-t-en-guerre répétant sans cesse ses erreurs (on est en plein dedans), et l’utilisation du poème Boots de Rudyard Kipling, récité, puis scandé, puis hurlé par le comédien Taylor Holmes, est évidemment ultra symbolique.
Un fourre-tout scénaristique sans tension ni suspense auquel viennent s’ajouter une sorte d’évolution hiérarchique des infectés (avec, en haut de la pyramide, les Alphas, espèces de surhommes quasi invincibles au pénis conséquent et capables de se reproduire), des militaires suédois, un médecin New Age adepte de la sculpture en crânes humains et, en guise de "surprise finale", une bande de Power Rangers fêlés du bocal et en survêt coloré censée ouvrir la voie aux deux prochains volets (puisque cette suite a été envisagée sous forme de trilogie). Pas sûr que le spectateur y trouve son compte tant il y a, ici, à boire et à manger et d’incohérences (par exemple quand l’Alpha, shooté à la morphine, est inexplicablement laissé sain et sauf), et pas sûr non plus qu’il ait envie de se taper deux autres films du même acabit (dont The bone temple, déjà prévu pour début 2026).
Et si 28 jours plus tard avait réussi à casser les codes du film de morts-vivants, alors sous influence romerienne, ouvrant la voie à une nouvelle représentation de zombies particulièrement véloces et carnassiers (L’armée des morts, The walking dead, World war Z…), 28 ans plus tard donne l’impression de régresser vers un truc lambda cherchant à plagier ce qui a fait le succès de… 28 jours plus tard. On tourne en rond. Filmé, écrit et monté n’importe comment, et tourné en partie avec plusieurs iPhones 15 Pro Max (contre une caméra DV à l’époque de 28 jours plus tard) pour un résultat proche du totalement inutile, voire du mauvais goût, Boyle se soucie peu d’une quelconque unité stylistique, jamais avare d’effets en tout genre et de cadrages grotesques (Spike qui vomit sur la caméra), et ce jusqu’à saturation. Et de la bienséance esthétique, et de nos humeurs indulgentes.
Danny Boyle sur SEUIL CRITIQUE(S) : Sunshine, Slumdog millionaire, 127 heures, Trance, Steve Jobs, T2 Trainspotting.