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Police

Après le Police de Maurice Pialat et le Polisse de Maïwenn, voici donc le Police d’Anne Fontaine, moins brillant que le machin chaotique et fiévreux de Pialat, mais pas plus que le machin lourdaud de Maïwenn. Fontaine et sa coscénariste Claire Barre ont adapté le roman d’Hugo Boris pour en faire, elles, un machin insipide malgré les forts enjeux psychologiques proposés par l’histoire. Soit trois flics qui doivent reconduire Tohirov, un demandeur d’asile tadjik, à la frontière (du moins à l’aéroport), sachant que celui-ci risque d’être exécuté s’il rentre dans son pays. Un cas de conscience s’impose alors à eux : faire "simplement" le boulot sans (se) poser de questions ou permettre à Tohirov de s’échapper (et d’échapper à une mort probable).

Entre deux rengaines variétoches à la radio (du Balavoine et du Lavoine, et il faut réussir à ne pas éclater de rire, ou à ne pas soupirer de découragement, quand Omar Sy se met à fredonner Elle a les yeux revolver) et quelques atermoiements existentiels et sentimentaux, Virginie, Aristide et Erik se demandent si la désobéissance civile est soluble dans le port de l’uniforme. Cette réflexion, censée opposer les trois protagonistes à leur propre vérité et amener, selon Fontaine, le spectateur à "pouvoir naviguer avec ses propres interrogations sur la transgression", se retrouve malheureusement très vite diluée dans une artificialité tant au niveau des dialogues (entre autres lors d’une scène de drague entre Virginie et Aristide, gênante) que dans une construction narrative poussive : les changements de points du vue, en début de film, n’apportent strictement rien au développement de l’intrigue et des personnages, avant que le film ne se resserre en un huis clos dans une voiture entrecoupé de flashbacks maladroits.

Et puis cette façon de mettre en parallèle les tracas du quotidien de trois flics au dilemme moral auquel ils sont confrontés (ainsi qu’au sort incertain de Tohirov, qui n’a plus que son silence comme seule dignité) est plus que contestable, réduisant le possible geste de sédition (et, accessoirement, la vie d’un homme) à un truc de plus à gérer dans la journée entre une décision d’avortement, un mariage qui bat de l’aile, un mari violent ou une mère infanticide. Étude sociale et "suspens humaniste" ne sont visiblement pas compatibles, en tout cas Fontaine ne parvient jamais à les concilier, à composer avec, pas aidée non plus par Virginie Efira, Omar Sy et Grégory Gadebois qui, et on les comprend, ne semblent pas vraiment à l’aise ni inspirés dans des rôles sans finesse.
 

Anne Fontaine sur SEUIL CRITIQUE(S) : Perfect mothers, Marvin ou la belle éducation.

Police
Tag(s) : #Films

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