Auteur prolifique (quasiment un roman tous les ans depuis 2001), Philippe Besson a, bizarrement, été très peu adapté au cinéma (le magnifique Son frère par Patrice Chéreau en 2003, et puis plus rien), quand le théâtre lui a davantage fait les yeux doux. Pas de chance : pour une fois que le cinéma s’intéressait enfin, de nouveau, à l’une de ses œuvres, il s’avère que l’adaptation d’Arrête avec tes mensonges n’est qu’une cuisante déception. Un machin d’une fadeur extrême qui ferait passer un téléfilm de France 3 Régions pour du Bergman. Tout ici est mal joué, mal dialogué, mal filmé, comme si Olivier Peyon avait décidé, conscient soudain de son incapacité à s’emparer cinématographiquement du texte de Besson, de faire une croix sur la moindre volonté d'ambition narrative et formelle.
Rarement le film parvient à traduire, à signifier la douleur toujours vive, des années après, d’un premier amour perdu (un écrivain revient dans la ville où il a grandi et y rencontre le fils de ce premier amour). À aborder de façon pertinente des thèmes poignants et universels (poids du passé, quête de la vérité, acceptation de son homosexualité…). Il n’y a, de fait, pas grand-chose à ressentir face à ce récit d’un deuil sentimental impossible puisque tout est traité de façon convenue, sans recherche d’un peu de singularité, de trouble ou de désordre. On regarde ça dépité, pas concerné une seconde, en mode soupirs et ennui profond, jusqu’à ce final démonstratif lesté d’un discours gnangnan qu’accompagnent quelques notes d’un piano qui dégouline.
Quant à l’interprétation, là aussi c’est morne plaine. Julien de Saint-Jean surjoue le beau gosse ténébreux luttant contre ses sentiments et sa virilité, et Guillaume de Tonquédec, qui passe le film à tirer la tronche en croyant exprimer désarroi et affliction, ressemble à ce qu’une AI devenue folle aurait pu générer en créant un mélange entre Laurent Ruquier, Pascal Sevran et un flan. C’est dire le niveau d’empathie que l’on peut avoir pour son personnage, jamais complexe, jamais attachant, jamais captivant. Il n’y a bien que Victor Belmondo et Jérémy Gillet (pourtant c’était pas gagné pour lui vu la tête de demeuré qu’on lui a fait) qui s’en sortent, et Guilaine Londez aussi, mais Guilaine, on l’adore tout le temps de toute façon. À la fin, à la place, on imagine Dolan, Honoré ou même Ozon s’emparant du projet avec, à n’en pas douter, davantage de fièvre et d’envie de cinéma, et puis on imagine encore, et puis encore…