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Pulp fiction

Palmes d’or légendaires 4/7 - 1994


Davantage que Sailor et Lula, et parce que Tarantino n’était pas encore tout à fait un réalisateur culte ni un auteur confirmé comme Lynch, Pulp fiction est réellement la palme d’or la plus surprenante de l’ensemble du palmarès cannois (avec un doigt d’honneur à la clé). Qu’une telle œuvre furieuse, comédie noire et sanglante se construisant sur les bases d’une contre-culture multiple (musique, cinéma, télévision, littérature) et avant tout américaine, puisse avoir remporté la récompense suprême est un beau pied de nez à un certain Establishment rigoriste. On est loin, effectivement, des plus consensuels Pelle le conquérant, L’anguille, Le vent se lève ou même La chambre du fils.

Ces histoires entremêlées de tueurs, d’overdose, de Big Mac, de montre en or et de braqueurs du dimanche ont quelque chose d’une blague parodique et surréelle (la violence, omniprésente, n’est jamais totalement explicite, plus graphique et détonante que viscérale). La structure chronologique et feuilletonesque du film permet un astucieux remodelage du temps, passé et présent fragmentés créant un va-et-vient de la narration et des protagonistes, et même une résurrection surprenante (le film a de nombreux échos religieux), celle de Vincent Vega, tué en milieu de film puis revenant pour le final. C’est que Tarantino traite ses personnages non pas comme les éléments d’une réalité établie, mais comme des icônes pop ou des archétypes cinéphiliques avec leurs propres légende et nostalgie (Walken dans Voyage au bout de l’enfer, Willis dans Piège de cristal, Travolta dans La fièvre du samedi soir).

Il ne cherche pas, non plus, à rationaliser ou moraliser les actes de chacun (qui, de toute façon, en subissent les conséquences), mais à faire de son film une œuvre bis ultime et farfelue dans ses plus évidents détails (la danse étrange, sorte de parade nuptiale chaloupée, entre Mia et Vincent, Jules épargné par les balles, les flics sado-masochistes, la mallette mystérieuse dont Tarantino dira : "Quoi que tu penses au sujet du contenu de cette valise, sache que tu as raison"). Souvent copié, jamais égalé, Pulp fiction a ouvert la voie à une nouvelle forme de polar déjanté et ultra-référentiel. Tarantino continuera par la suite à explorer l’histoire et la mémoire du cinéma de genre pour en magnifier, avec plus (Jackie Brown, Kill Bill) ou moins (Boulevard de la mort, Inglourious basterds) d’enthousiasme, ce qu’il a d’intimement moderne et novateur.


Quentin Tarantino sur SEUIL CRITIQUE(S) : Boulevard de la mortInglourious basterdsDjango unchained, Les huit salopards, Once upon a time in... Hollywood.

Pulp fiction
Tag(s) : #Cycles

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