En terme de survival, on a eu droit à peu près à tout : jeunes hyper violents, zombies, cannibales, ploucs du coin, chose venue d’un autre monde ou serial killer à la tronçonneuse… Mais jamais encore de skinheads néonazis à la machette et leurs gentils pitbulls gentiment surexcités. Ça change. Donc un groupe de quatre jeunes punks rockers blafards (exit bimbos et beaux gosses décérébrés) se retrouvent à donner un concert dans un bar louche de rednecks extrémistes de l’Oregon, et puis y’a un cadavre qui traîne en backstage, et puis tout s’emballe, et puis les voilà coincés dans une pièce et qu’on cherche à les éliminer à coups de cutter et de fusil à pompe. Punks are almost dead.
Jeremy Saulnier se réapproprie ainsi les codes du genre pour en faire un drôle de film oscillant entre calme plat, tensions psychologiques et poussées gore juste ce qu’il faut de gore. Le schéma ultra classique du "survivre en milieu hostile" (avec autochtones encore plus hostiles collés au cul) reste (ultra ?) classique jusqu’au bout, et Saulnier n’évite pas toujours quelques maladresses de rythme et autres raccourcis scénaristiques. C’est davantage dans les détails que Saulnier va plus ou moins parfaire (et réussir) son exercice de style en distillant instants magiques (reprise jubilatoire de Nazi punks fuck off des Dead Kennedys, un mosh de fachos qui n’a jamais été aussi beau…) et lambeaux d’humour noir.
Pour preuve, le film est plus convaincant dans sa première moitié (ambiance trouble et délétère, quotidien bouseux des quatre héros, l’arrivée au bar…) avant de s’essouffler quand il décide de passer en mode boucherie, et les personnages perdent eux aussi de leur intérêt, devenant trop rapidement de la chair à pâté (et pour chiens), même si les pauvres chéris sont là pour ça, et puis quoi encore… On peut regretter également que Green room n’aille pas encore plus loin dans le jeu de massacre vaguement théorique au vu du potentiel mis en place, mais la maîtrise formelle de Saulnier (pas d’esbroufe, réalisation soignée) permet à son slasher étrange d’échapper (de pas grand-chose) aux abîmes du genre, ces abîmes où grouille pléthore de nanars désormais oubliés.
Jeremy Saulnier sur SEUIL CRITIQUE(S) : Blue ruin, Hold the dark.